Balade dans la vallée de la Holzwarche
Dans les Cantons de l’Est, la vallée de la Holzwarche abrite une superbe réserve naturelle, terre de prédilection des randonneurs, jeunes et moins jeunes. N’hésitez pas à faire appel aux services d’un.e guide de l’association locale de protection de la nature. Il ou elle se fera un plaisir d’éclairer les touristes sur le présent et le devenir de la région.
Du sentier de randonnée en surplomb, on domine toute la vallée. Un petit troupeau de buffles campe au bord de la rivière Holzwarche. L’un de ces puissants bovidés est vautré dans la terre humide de la berge, d’autres broutent, sont assoupis et nous toisent paisiblement. « Les buffles participent à la préservation des sites naturels. Ils broutent les buissons qui auraient sinon le dessus », explique Alexander Rauw de la section Cantons de l’Est de Natagora/BNVS, l’association de protection de la nature.
Alexander, qui a étudié l’architecture paysagère en Allemagne avant de revenir dans sa patrie des Cantons de l’Est, est désormais guide nature. Aujourd’hui, il accompagne en randonnée un père, Jörg, et ses deux filles, Claire et Olivia. Les enfants n’ont que trois et cinq ans, mais sont fascinées par les gros buffles. La famille est sous le charme de la nature. Ils reniflent les plantes odorantes, chassent les papillons bigarrés, aveuglés par les rayons du soleil qui filtrent à travers le feuillage.
La Holzwarche prend sa source à 660 mètres d’altitude, dans le petit village de Losheimergraben, pile à la frontière germano-belge. Le petit ru file ensuite vers le nord-ouest avant de se jeter dans le lac de retenue de Bütgenbach. Son parcours est resté dans un état relativement naturel. Une réserve naturelle y a vu le jour en 1978 grâce aux fonds européens et à des dons privés, ainsi qu’à l’achat de terrains. La zone couvre aujourd’hui quelque 80 hectares. C’est le fleuron de l’association de protection de la nature Natagora/RNOB (Réserves naturelles et ornithologiques de Belgique). Sa flore et sa faune sont extrêmement diversifiées.
Le travail réalisé par l’association fait aujourd’hui le bonheur du guide nature Alexander Rauw et de la petite famille. L’agréable sentier fait une boucle d’environ cinq kilomètres entre Rocherath et Mürringen, au départ du moulin d’Enkelberger à Büllingen. La grande partie du tracé longe la rivière, qui joue parfois à cache-cache entre les grands arbres et les végétaux. Alexander, un passionné, ne s’en soucie guère, absorbé qu’il est dans ses explications sur la flore et la faune. Les enfants et leur papa l’écoutent religieusement.
Crédits photos: Jochen Tack Ils n’en reviennent pas de tout ce qu’on peut croiser en route. Comme le fenouil des Alpes au parfum aromatique ou la grande pimprenelle, qui rappelle un peu la framboise et peut atteindre un mètre de haut (une plante chouchou d’Alexander). Ou encore l’épilobe à feuilles étroites (rose) et la campanule à feuilles rondes (bleue). La reine-des-prés, la centaurée noire, la renouée bistorte, la potentille des marais et d’autres espèces assurent une profusion de couleurs au fil des saisons. Certains spécimens ont leurs particularités : « Le petit rhinanthe, par exemple, s’accroche aux racines d’autres herbes pour les délester de leurs nutriments. On parle d’hémiparasitisme », explique Alexander. « C’est pas gentil », déplore Olivia. « Mais c’est aussi une bonne chose, parce que d’autres fleurs peuvent alors mieux pousser », tempère le guide nature.
Crédits photos: Jochen Tack Le cours supérieur de la Holzwarche fait ici office de réservoir d’eau naturel. Même au plus fort de l’été, la zone reste humide en raison des nombreuses dolines. Le sol des tourbières est comme une éponge qui absorbe de grandes quantités d’eau. C’est un pays de landes et de prairies humides, de boulaies (forêts de bouleaux), de bas-marais peuplés de linaigrettes et de narthécie des marais ainsi que de nardaies. Sur certains versants des vallées, la biodiversité est extrêmement riche. On recense plus de 190 espèces végétales sur moins de deux hectares de prairies, dont plusieurs espèces menacées.
Les magnifiques champs de jonquilles égaient le printemps sur les rives de la Holzwarche près de Rocherath. Les nombreux hectares de prairies se couvrent alors d’un tapis de fleurs jaunes. Cette attraction en soi attire les amoureux de la nature d’ici et d’ailleurs. À la mi-avril, Natagora organise même un festival de la jonquille avec une bourse aux plantes au moulin de l’Enkelberger. Le reste de l’année, cependant, la vallée est plutôt calme, comme le confirme Alexander, « mais ce sera notre petit secret… »
Cette quiétude fait le bonheur d’une faune variée. Dans les vastes pâturages, les vaches tiennent compagnie aux buffles. Geai, bec-croisé des sapins et chouette de Tengmalm : de nombreuses espèces rares d’oiseaux ont élu domicile dans la vallée de la Holzwarche. Ils nidifient dans les grandes pessières de la région. La bergeronnette des ruisseaux traque les insectes sur la rivière ; les martins-pêcheurs chassent le menu fretin.
Alexander a toujours un filet à papillons à portée de main en randonnée. Tout à coup, il accélère le pas, agitant son filet comme un sabre de chevalier Jedi. Un papillon rare est pris au piège. Un bocal à conserves vide fait un parfait oculaire. Le papillon se laisse observer tranquillement sans être blessé. Le petit captif sera ensuite relâché. « Les papillons sont un excellent indicateur de l’état de santé de la nature, ajoute notre guide nature. La vallée abrite des espèces très rares. » Les enfants sont ravis. C’est un moment particulier pour eux.
Crédits photos: Jochen Tack La petite troupe fait une petite pause au refuge au point le plus bas de la vallée. Du pont qui enjambe l’étroite rivière, on distingue bien les poissons qui font des ronds dans l’eau. Il est temps de rentrer. Le petit groupe remonte un sentier en gravillons jusqu’à un promontoire d’où se dégage un beau panorama sur la vallée, les arbres noueux et les pâturages où paissent tranquillement les vaches. Olivia veut se tirer le portrait avec l’un de ces paisibles ruminants, mais renonce finalement à son projet. Courageuse, mais pas téméraire… Le dernier tronçon s’insinue dans les sous-bois, passe devant quelques chalets de vacances et traverse une dernière fois la Holzwarche, avant de rallier le point de départ. Le papa et les enfants sont un peu fatigués, mais heureux.
« J’aime le changement, le contact avec les gens, confie Alexander, guide passionné et passionnant. Mais simplement rouler à vélo, profiter du calme et du paysage, c’est aussi un grand bonheur, en toutes saisons, qui sont encore ici très contrastées. » En été, on vient chercher un peu de fraîcheur dans la vallée. En automne, même si c’est rarement l’été indien, le paysage revêt ses habitats flamboyants. En hiver, il y a facilement 50 centimètres de neige, et des congères. « Le printemps est des plus spectaculaires, conclut Alexander. C’est le réveil des petites bêtes. Alors la vallée de la Holzwarche, avec son tapis de jonquilles, est un paradis. »
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